Bienvenue dans mon vrac.

Vous y trouverez des textes variés : Grandeur Nature, atelier d'écriture, poèmes ou autres : aventures et histoires.

En vous souhaitant de prendre autant de plaisir à les lire que j'en ai eu à les écrire.

Flamme

C’était à Mégara, …, dans les jardins d’Hamilcar.
 
Je buvais le jus d’un de ces fruits que l’on ne trouve que dans les oasis qui parsèment le désert de medjaï ou dans les quelques villes aux abords du désert, comme ici. J’étais à l’ombre d’un figuier, à moitié assoupi, assommé de chaleur, lorsque Joann vint me rejoindre.

« Je vous en prie maître, acceptez… »

Mon regard chercha le sien et je me revis, quelques mois plus tôt, recevant chez moi cet homme enturbanné qui ne parlait pas un mot de commun et n’avait cessé de répéter : baernmislir ? baernmislir ? jusqu’à ce que je hoche frénétiquement la tête. Il m’avait alors tendu un parchemin, l’agitant devant moi jusqu’à ce que je le prenne.

Mon cher Baern

Je ne fais point ici demande de remboursement de dette car à mes yeux, je reste votre débiteur. Néanmoins, je vous appelle car je ne suis plus capable de trouver une solution. Il ne me reste plus d’espoir. Si vous accédez à mon humble demande, mon serviteur, Grag, se fera devoir de vous mener jusqu’à ma nouvelle demeure.

Avec l’espérance de vous serrer bientôt le bras.
 
Ezla Hamilcar.

Et bien soit. J’irais rembourser cette dette qui, prétendument, n’existait pas. Je fis oui de la tête à Grag et nous partîmes, le jour même, retrouver mon vieil ami. Le voyage se déroula sans incidents, à cheval, en bateau et à dos de chameau. Quelques semaines plus tard, nous arrivâmes chez Hamilcar.

Je ne révélerai ni les tenants, ni les aboutissants de la demande d’Ezla. Sachez seulement qu’il me fallait, en quelque sorte, accompagner Joann, la fille d’Halmicar et l’assister mais aussi la protéger autant que faire se pourrait.

« Si je n’avais pas eu l’intention d’accepter, je n’aurais pas fait ce voyage. »

Joann m’embrassa la main pour me remercier et quelques jours plus tard, nous prenions la route. Notre équipage se composait de sept personnes : Joann et son escorte – Grag, limaye, Mala et Fregolo - un jeune garçon qui s’occupait des bêtes – Ken - et moi-même. Rien ne vint troubler les deux premières semaines de voyage mais dans le courant de la troisième, nous vîmes au loin un nuage sombre, d’une hauteur impressionnante : Une tempête de sable.

Du temps où il m’arrivait de passer du temps à l’université de Pagolos, le professeur Simon m’avait parlé de ces trombes de sable qu’il ne connaissait que par lecture interposée, véritables monstres vivants détruisant toute chair sur leurs passages. Je voyais arriver vers moi, ma mort, inéluctable.

Sans témoigner la moindre panique, les gardes nous entraînèrent au bas d’une dune, à l’opposé du monstre arrivant, et commencèrent à creuser. Je les aidais autant que possible.

Dans le creux, ils installèrent la tente et la recouvrirent de sable, nous faisant signe d’y entrer.

Alors, la tempête fut sur nous. D’abord simple crépitement, elle devint grondement, rugissement, hurlement. Nos montures hurlèrent leur douleur avant d’être emportées. Et la tempête hurla sa rage, encore, pendant ce qui me sembla des heures.

Et puis d’un coup, plus rien.

La tente s’était alourdie du poids du sable, nous sortîmes alors aussi vite que possible, de peur d’être étouffés à jamais. Grag et Limaye qui aidèrent chacun de nous à s’extirper de ce piège de sable, n’en ressortirent pas.

Mais l’heure n’était pas au deuil. Nous n’étions pas sortis de la tempête, elle était toujours là, tout autour de nous. Et nous ne pourrions pas récupérer nos tentes pour nous enterrer une seconde fois. Nous étions morts.

C’est alors que je vis l’affleurement rocheux. Un angle de bâtiment trop bien taillé pour être naturel. Peut être une ancienne mastaba. Peut être une chance de survie.
 
 J’entraînais le groupe vers cette roche et me mis à creuser frénétiquement. Bientôt chacun, de ses mains, rejetait le sable comme il pouvait. Et tandis que le vent recommençait à nous piquer, nous griffer, nous mordre, nous creusions.

Un trou ! Je pris joann et la poussais dedans. J’allais y envoyer Ken lorsqu’une rafale de vent le projeta au loin. Mala me poussa en avant et nous plongeâmes dans le noir, suivis par Fregolo.

Le vent repris sa force et reboucha le trou. Nous étions dans le noir.

Mala nous rapporta la lumière par son briquet et une torche de fortune. Elle ne durerait pas longtemps.

Nous avançâmes dans le tunnel pour déboucher dans une petite salle : Un tombeau. Où plutôt, la salle des gardiens du tombeau. Ils étaient huit, vêtus de guerre, assis en tailleur, l’arme à la main, un cimeterre. Leurs visages desséchés apparaissant sous des bandelettes.

Mala s’empara d’une des lampes à huile et en gratta le fond. Il en prît ensuite une autre et les ramassa toutes. Je ne sais au juste comment il s’y prit mais bientôt, il en alluma une.

Nous laissâmes les gardes et entrâmes dans la pièce suivante : Le tombeau. Peut être n’avait-il pas été roi mais celui qui gisait ici avait au moins été un grand chef. Les richesses qui l’accompagnaient dans son repos éternel étaient nombreuses : armes, vêtements, bijoux et objets de la vie quotidienne, usés par le temps.

Sur les murs, des fresques semblaient raconter une histoire. Peut être son histoire. Des scènes de champ, des scènes de famille, des scènes de guerre. Mais aussi des créatures fantastiques ; Un homme à tête de crocodile, un autre à tête de loup, une femme à tête de chat. Et puis des runes que j’essayais de déchiffrer. Tanit. Il s’appelait Tanit.

Tout à ma lecture, je ne vis pas Joann s’approcher du tombeau. Je ne la vis pas repousser le manteau du mort. Je ne la vis pas se faire saisir à la gorge par une main desséchée. Mais j’entendis son cri lorsque le mort la saisit et colla son visage contre le sien en un mortel baiser. Sous mes yeux, Joann se dessécha, elle aussi, en quelques secondes.

Fregolo saisit une lance et tenta d’en piquer le mort mais n’y parvint pas. Le gisant se redressa. Il lâcha Joann qui resta immobile, figée pour l’éternité et se jeta sur Fregolo qui, un instant plus tard, se dessécha lui aussi. C’est alors qu’il me fit face. Je pris la lance de la main de Fregolo qui se déchira sous le choc et la plantai en plein cœur du mort. Elle le traversa de part en part et, par chance, arracha ce qui avait du être son cœur : Une sorte de boule blanchâtre racornie par les ans. Le cadavre s’écroula.

De la pièce à côté, un bruissement nous confirma ce que nous savions déjà : Les gardes arrivaient. Mala me prit la lance des mains, y enroula le manteau de Tanit et l’inonda de ce qui restait sans sa lampe. Une grande flamme se fit. Il avança résolument vers les gardiens que les flammes semblaient hypnotiser. Nous traversâmes leurs rangs sans recevoir un seul coup. Et bientôt, revenu à notre point de départ, je creusais, creusais comme un fou, subissant l’avalanche de sable, pour retrouver la sortie.

Les flammes se réduisirent et finirent par s’éteindre. La lumière apparut. Je me faufilais vers le haut, nageant dans le sable, Mala à ma suite. Lorsque je m’extirpais, je me retournais pour lui saisir la main et le tirer à moi mais une force colossale m’entraîna vers le bas et nos mains se lâchèrent. Le sable reboucha le trou.

Je ne survécu que par la grâce d’une tribu nomade qui me trouva quelques plus tard, au seuil de la mort.

J’ai tu volontairement le pourquoi initial de cet événement. Je n’ai écrit ces lignes que pour dire :

Ainsi mourut la fille d’Hamilcar pour avoir touché au manteau de Tanit.

Le rabrochet Caillou Le corail Détail Flamme Lettre à Georges Insolence Marteau Réveil Volte face Ahmad

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